TikTok au Bénin : un danger pour la jeunesse ou une opportunité mal exploitée ?

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Parlons-en N°005

L’usage de TikTok au Bénin suscite de plus en plus d’inquiétudes. Cette plateforme, conçue à l’origine par les Chinois comme un outil de communication et de promotion des affaires, est aujourd’hui détournée par une partie de la jeunesse béninoise. Si, ailleurs, TikTok est perçu comme un levier économique et un moyen d’expression artistique, au Bénin, il tend davantage à devenir le théâtre de dérives inquiétantes.

En effet, il est impossible d’ignorer la montée fulgurante d’une forme de jeunesse désœuvrée qui, loin de chercher à s’insérer professionnellement, trouve en TikTok un moyen facile de se faire de l’argent. Il suffit d’un smartphone Android et d’une connexion internet pour se lancer dans une course effrénée aux vues et aux « j’aimes ». Toutefois, au lieu d’exploiter cette plateforme pour mettre en avant des talents, des compétences ou des initiatives porteuses, beaucoup de jeunes béninois l’utilisent pour diffuser des contenus vulgaires, parfois provocants, et promouvoir un style de vie basé sur la fainéantise et le sensationnalisme. Les défis absurdes, les insultes à répétition, et pire encore, l’exposition gratuite de tenues suggestives deviennent monnaie courante, laissant craindre un appauvrissement moral et intellectuel de la jeunesse.

Plus préoccupant encore, certaines pratiques frôlent la promotion déguisée de la prostitution, avec des vidéos où l’apparence et les sous-entendus priment sur le contenu et l’authenticité. Des jeunes filles n’hésitent plus à le faire à visage découvert, laissant même ouvertement leurs contacts à qui veut pour s’offrir leurs services. Cette dérive pose une question fondamentale : TikTok est-il en train de banaliser des comportements autrefois condamnés par la société béninoise ?

Ce phénomène n’est pas propre au Bénin. Plusieurs pays ont déjà pris des mesures drastiques face aux dangers de TikTok. L’Inde, par exemple, l’a interdit en 2020, évoquant des préoccupations liées à la sécurité nationale et à l’impact négatif sur sa jeunesse. Même en Chine, le pays d’origine de l’application, l’accès à TikTok (ou plutôt à sa version locale, Douyin) est strictement encadré. Les jeunes chinois ne peuvent l’utiliser que 40 minutes par jour, et les contenus qui y sont diffusés mettent davantage l’accent sur l’éducation, la culture et l’innovation. Pourquoi le Bénin ne pourrait-il pas s’en inspirer pour protéger sa jeunesse ?

Le plus préoccupant est que ces influenceurs béninois, qui ne produisent souvent que des contenus futiles et dérangeants, jouissent d’une popularité grandissante. Certains d’entre eux sont même plus admirés que les jeunes entrepreneurs qui, avec sérieux et abnégation, tentent de bâtir des entreprises et de contribuer au développement du pays. Ce décalage envoie un message troublant à la jeunesse : pourquoi se tuer au travail quand quelques vidéos suffisent à gagner plus d’argent et à attirer davantage d’attention ?

Pire encore, certains vont jusqu’à organiser des virées festives entre amis, exhibant sans complexe leur « réussite » basée sur le fainéantisme, au nez et à la barbe de nos autorités. Ces événements, souvent filmés et largement partagés, ne font que renforcer l’idée que la célébrité et l’argent facile sont les seules voies vers le succès, au détriment du travail acharné et de l’intégrité.

Ce n’est pas tout. TikTok devient également un espace où les mœurs sont dangereusement bousculées. La promotion de l’homosexualité, des comportements déviants et même le culte des défunts y trouvent une place de choix, sans qu’aucune régulation ne semble pointer à l’horizon. Pourtant, il est urgent d’agir. Les autorités béninoises doivent prendre conscience de l’impact profond et durable que cette plateforme peut avoir sur les mentalités et sur la société tout entière. L’inaction face à cette décadence morale pourrait bien être interprétée comme une forme de complicité ou, à tout le moins, d’indifférence coupable.

La solution n’est cependant pas forcément d’interdire TikTok. Une telle mesure pourrait se révéler contre-productive, voire répressive. L’idéal serait plutôt d’encadrer son utilisation par des réglementations claires, imposant par exemple des restrictions d’âge, la promotion de contenus éducatifs et utiles, et une surveillance plus stricte des contenus partagés. Des campagnes de sensibilisation pourraient également aider les jeunes à mieux comprendre les dangers liés à l’usage irresponsable de cette application.

Le Bénin a tout à gagner à transformer TikTok en un levier d’épanouissement et de développement pour sa jeunesse, plutôt qu’en une arène de vulgarité et d’oisiveté. Il est temps d’agir avant que le mal ne soit irrémédiable.

Abbas TITILOLA

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