Mario Metonnou à l’audience de ce jeudi : « je suis plongé dans un conflit entre l’amitié, l’affection et le devoir »

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La sixième journée du procès des accusés dans l’affaire de complot contre l’autorité de l’État s’est ouverte ce jeudi à la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET). L’audience, empreinte de tension, a été dominée par les réquisitions du procureur spécial Mario Mètonou, dont les déclarations ont mis en évidence les accusations visant Olivier Boko, Oswald Homéky et leurs coaccusés.

Un réquisitoire entre émotion et devoir

Mario Mètonou a ouvert son réquisitoire par des mots personnels et intenses, illustrant le poids de l’affaire :
« Je suis plongé dans un dilemme cornélien. Plongé dans un conflit entre l’amitié, l’affection et le devoir. (…) Je vous connais toujours, mais le devoir m’appelle. Je dois le confesser. J’aurais préféré être ailleurs ce matin. (…) J’aurais préféré que ce soit un canular, un mauvais rêve. »

Il a ensuite évoqué la portée et la faisabilité du projet reproché aux accusés :
« Le projet, tel que conçu, est réaliste et réalisable, vu les exemples du Niger et du Gabon. »

La nature des faits précisée

Face aux spéculations, le procureur a clarifié la nature des accusations :
« Notre dossier n’est pas un dossier de coup d’État. Nous ne jugeons pas une infraction de coup d’État. Mais plutôt un complot contre l’autorité de l’État. C’est un complot en vue de commettre l’attentat contre l’autorité de l’État. »

Mario Mètonou a également dénoncé ce qu’il considère comme une tentative de corruption ciblée : « Cette générosité exclusivement en direction du Colonel en charge de la sécurité du Président de la République n’est pas neutre. Il s’agit d’un cadeau offert dans un but de (…) briser la loyauté du Colonel. »

L’acquittement pour trois accusés

Dans un geste de nuance, le procureur a demandé l’acquittement de trois coaccusés : Hugues Adjigbékou, comptable de Rock Nieri, Corneille Gbaguidi, gérant d’une société appartenant à Rock Nieri, et Ganiou Sanoussi, chauffeur de l’épouse d’Oswald Homéky. Il a justifié cette demande en déclarant :
« Ils sont juste des agents d’exécution et n’avaient aucune idée des actes de leurs patrons. »

Les accusations contre Oswald Homéky

Selon l’audience rapportée par Banouto, le ministère public reproche à Oswald Homéky des gestes de générosité suspecte envers le commandant de la garde républicaine, le Colonel Dieudonné Tévoédjrè. Alors qu’il n’était plus en fonction et dans un contexte où il aurait pu manquer de ressources, l’ancien ministre a offert des cadeaux et souscrit une assurance prestige au bénéfice du Colonel. Selon le procureur, cette générosité inhabituelle visait à attirer la sympathie du Colonel.

« Cette générosité n’est pas anodine », a affirmé le procureur, estimant qu’elle visait à « briser la loyauté » du commandant envers l’État. Il a également relevé la rapidité des actions, indiquant que tout semblait orchestré pour un objectif précis.

Outre ces gestes, une somme de 1,5 milliard de FCFA a été découverte au domicile de Homéky. Celui-ci a avancé plusieurs explications : d’abord qu’il s’agissait de fonds destinés à des investissements dans plusieurs pays, puis qu’ils devaient financer des activités de la dynamique OB26. Cette variation dans ses déclarations a été jugée suspecte par le procureur.

D’autres comportements de Homéky, le jour de son arrestation, ont également éveillé les soupçons. Il aurait accueilli lui-même des invités, fermé son portail en écartant ses agents de sécurité, et interdit toute inscription sur le registre des visiteurs. Ces précautions, selon le ministère public, visaient à dissimuler des informations cruciales.

Pour le procureur, Oswald Homéky a tenté de recruter le commandant de la garde républicaine et de lui fournir les moyens nécessaires pour exécuter un complot. Ces éléments suffisent, selon lui, à établir la culpabilité de l’ancien ministre.

Les accusations contre Olivier Boko

Pour Mario Mètonou, Olivier Boko est le principal instigateur et financier présumé du complot. Le procureur a posé trois questions essentielles : Qui avait intérêt ? Qui avait les moyens ? Qui a financé ?

Qui avait intérêt ?
Le procureur a estimé qu’Olivier Boko avait un intérêt direct dans la réussite du complot, étant donné que la dynamique menée par Oswald Homéky, OB26, était liée à ses ambitions politiques.

Qui avait les moyens ?
Selon le ministère public, Homéky ne disposait pas des ressources nécessaires. Déclarant un revenu annuel de 70 millions FCFA, il n’aurait pas pu offrir 50 millions FCFA au Colonel. En revanche, Olivier Boko, dont les revenus annuels s’élèvent à 4 milliards FCFA, avait les capacités financières pour soutenir de telles actions.

Qui a financé ?
Des fonds attribués à Olivier Boko, dont 250 millions FCFA transférés depuis le Togo, ont été remis à Oswald Homéky. Le procureur a également évoqué des retraits successifs effectués par le comptable de Rock Niéri au nom de Boko. Une partie de ces fonds aurait été retrouvée dans l’argent saisi au domicile de Homéky.

Le ministère public conclut qu’Olivier Boko est le principal financier de l’opération.

Les accusations contre Rock Niéri

Rock Niéri, actuellement en fuite, a été jugé par contumace. Le procureur spécial a affirmé que son absence au procès démontre une volonté d’échapper à la justice. Malgré les mandats et convocations, il n’a pas répondu aux appels de la Cour. Pour le ministère public, cette fuite est une reconnaissance implicite de culpabilité.

Les peines requises à l’encontre des trois

Le procureur a demandé les sanctions suivantes :

Rock Niéri : 20 ans de prison et une amende d’un milliard FCFA

Olivier Boko : 10 ans de prison et une amende de 1,5 milliard FCFA

Oswald Homéky : 10 ans de prison et une amende de 1,5 milliard FCFA

En outre, il a requis la confiscation des 1,5 milliard FCFA découverts chez Oswald Homéky ainsi que du véhicule utilisé pour transporter les fonds.

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