Littérature- Steve Bodjona : la voix togolaise au cœur de la culture

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Dans le cadre de notre exploration des voix qui œuvrent à l’affirmation de l’identité culturelle ouest-africaine à travers l’écriture, notre attention s’est portée sur une plume singulière. C’est dans ce sens que nous avons découvert les ouvrages d’Aléwabia Délali Aklesso Bodjona, plus connu sous le nom de Steve Bodjona. Par ses écrits, ce togolais contribue à faire résonner les héritages, les mémoires et les aspirations d’une région en quête de récit authentique.
Cet homme, à la fois diplomate, juriste, écrivain et acteur culturel togolais, nous a immédiatement captivés. Son œuvre littéraire, empreinte d’une profonde humanité, explore avec sincérité les grands thèmes de l’existence : l’amour, la résilience, l’identité et la dignité humaine.
Il est également le promoteur de la Foire Internationale du Livre de Lomé (FI2L), et son ouvrage Des larmes au crépuscule a même été intégré au programme scolaire togolais.
En parcourant ses écrits, nous avons été touchés par la sagesse et la poésie de ses mots. Voici quelques extraits qui ont marqué notre équipe, des réflexions que nous tenons à partager avec vous :


La puissance des liens humains et la force de la résilience
Dans son essai poignant, Le Cahier à Zénia (Empreintes Éditions, 2021), Steve Bodjona nous rappelle l’importance capitale des rencontres qui illuminent nos vies :
« Il est de ces personnes que Dieu place sur le parcours d’autrui pour illuminer sa vie et lui faire comprendre que de par sa foi en lui, il est toujours présent à travers la présence d’un proche, à travers le sourire qu’il partage, à travers le réconfort qu’il apporte. »
Ces mots résonnent comme une ode à la bienveillance et à la connexion. Mais l’auteur va plus loin, en nous offrant une précieuse leçon de persévérance face aux défis de la vie :
« Notre grandeur ne réside pas dans le fait que nous réussissons tout ce que nous entreprenons. Il ne s’agit pas non plus d’être de ceux qui n’ont jamais connu de difficultés. Elle se trouve bien au contraire dans notre capacité à surmonter les épreuves par lesquelles la vie nous forme et dans l’humilité avec laquelle nous acceptons nos plus vilains défauts, dans notre aptitude à accepter, si nécessaire, de passer par l’humiliation pour nous relever. L’important après tout, c’est de toujours se relever, peu importent les vicissitudes de la vie. »


L’amour : une folie patiente et lumineuse
Dans ce même ouvrage, l’amour est dépeint comme un art exigeant, fait de patience et de compréhension :
« Autant l’amour se nourrit de désir, autant il se nourrit de patience. Un cœur qui aime sait attendre. Il sait se montrer compréhensif, trouve au-delà des motifs, les raisons pour justifier le manque d’entrain de la personne dont on est épris. »
Et avec une touche d’audace, il nous invite à embrasser pleinement cette “folie” qu’est l’amour :
« Autant être fou d’amour que de folie dégénérative. Les folies sont les plus belles audaces de la vie. »
Sa vision de l’espoir est tout aussi inspirante, rappelant que même dans les moments les plus sombres, la lumière persiste :
« Ce n’est pas parce que l’on tourne le dos à une lumière, que l’on s’obstrue les yeux pour ne pas la voir, qu’elle cesse de briller. Même dans le plus noir obscur, la lumière prend ses droits et illumine tout autour d’elle. »


La lecture : un refuge et la patrie du cœur
Fidèle à sa passion dévorante pour les livres, Steve Bodjona affirme avec simplicité :
« La lecture, c’est tout simplement le chemin de la connaissance. »
Puis, dans une confession plus intime, il révèle le réconfort qu’il trouve dans les pages :
« Je lis et le livre m’apaise. Il me réconforte quand je me sens seul, car il suffit de quelques pages pour que je me sente riche des mots que je découvre, et entouré des personnages avec lesquels je voyage à travers l’intrigue. »
Il médite également sur la notion d’attachement à la patrie, la définissant comme un lieu de cœur plutôt que de naissance :
« “Notre chez nous”, ce n’est pas là où nous sommes nés et encore moins là où nous vivons. C’est partout où notre cœur se sent aimé, qu’importe qu’il y soit ou pas. Il en est de même de notre attachement à notre pays. Pour aimer son pays, il faut le connaître. Pour le connaître, il faut le découvrir. Pour le découvrir, il faut partir à sa rencontre, le parcourir… Rencontre des cultures, rencontre de l’histoire, rencontre des hommes et des femmes qui ont écrit et qui écrivent chaque jour ce pays que l’on pense connaître sans en connaître le plus petit bout. »


Aimer l’autre : une force et un chemin partagé
Aimer l’humanité, avec ses paradoxes, demande une force particulière selon Steve Bodjona :
« Il n’est pas facile d’aimer. Il faut du cran et une réelle force pour aimer l’Homme, car, intrinsèquement ou extrinsèquement en lui, se côtoient des contraires, des invitations et en même temps des refoulements, de multiples raisons de ne point l’aimer. »
Et la relation humaine, quant à elle, est une danse subtile entre deux êtres :
« Une relation, ce sont deux possibles contraires qui s’harmonisent, deux personnes qui malgré leurs défauts s’acceptent et décident de faire du chemin ensemble en faisant toujours ressortir le meilleur de l’autre ? »


La vie, ses épreuves et la conscience de l’existence
Dans Misères et Chimères (2019), l’auteur poursuit cette quête introspective sur les chemins parfois sinueux de la vie :
« La vie n’est qu’une succession de conjectures que l’on ne choisit pas forcément de vivre. Certaines définissent notre personnalité, la modèlent. D’autres sont pour nous comme une artère dans la gorge dont on voudrait se débarrasser à tout prix, mais qui, rebelles, résistent à toute tentative et nous marquent pour toujours. »
Mais l’amour reste un transcendant :
« L’amour transcende tout pour le bonheur de l’être qu’on aime. »
Les difficultés, selon lui, sont aussi des révélateurs :
« Il y a de ces situations désastreuses que la vie nous fait traverser afin que nous prenions conscience des choses importantes que nous négligeons. »
Et d’une manière quasi philosophique, il nous invite à embrasser nos tourments pour mieux apprécier l’existence :
« La somme de tes difficultés, la combinaison de tes ennuis et la succession de tes soucis vont te donner la conscience de ton existence, car malgré la difficulté à les gérer, le jour où tu réaliseras qu’il n’existe plus un seul obstacle dans ta vie, que tes soucis sont comme évaporés et que les ennuis et autres difficultés semblent avoir pris la clé des champs, c’est que tu auras réalisé que tu n’es plus de ce monde. »
Il nous met également en garde contre le piège de l’apitoiement :
« Il nous arrive de passer notre temps à nous lamenter, à nous morfondre pour peu. Notre bonheur ne dépend nullement d’autrui. Nous traversons souvent de dures épreuves, il est vrai et avons parfois l’impression de ne pouvoir nous relever. N’oublions jamais, en ces moments surtout, que toute personne qui s’apitoie sur son sort se leurre et se trompe de combat. Se relever, faire face, aller de l’avant, telle devrait être l’attitude de toujours. »
Et la prudence face à l’orgueil :
« L’on pense souvent être né sous la plus belle des étoiles jusqu’à ce que nos propres actes ne fassent retourner le ciel contre nous. »


Rêves brisés et la responsabilité parentale
Dans Rêves Brisés (2023), Steve Bodjona aborde la question cruciale des responsabilités parentales avec une grande lucidité :
« Il importe de constamment garder à l’esprit que la responsabilité des uns et des autres, en tant que parents est grande. Il ne s’agit pas juste de procréer pour se faire fièrement appeler papa ou maman. La terre serait bien plus peuplée sinon. Il est bien plus question de protection et du bien-être des enfants. En aucun cas ces derniers ne devraient constituer une source de revenu pour quelque adulte que ce soit, y compris leurs propres parents. Au contraire, il leur appartient de suer sang et eau pour garantir un vécu paisible à leurs enfants, loin de toutes brimades et ceci, avec l’amour et l’attention due à leur âge. Ce n’est qu’à ce titre que toute personne pourrait se prévaloir d’un statut de parent. »
Il célèbre également l’impact profond de certaines rencontres fugaces mais déterminantes :
« Il y a des gens que l’on rencontre fortuitement et qui, en un bref laps de temps, vous apporte bien plus que ne le feront durant toute une vie ceux qui vous côtoient quotidiennement. »
Et rappelle la force inébranlable de l’amour pur :
« Dans le cœur où s’entretient un amour pur, le soleil luit toujours comme pour chasser au loin les ténèbres qui semblent régner en maître sur la terre. »
L’autonomie émotionnelle est également un thème cher à l’auteur :
« En toute chose, il importe d’éviter de confier à autrui les rênes de notre épanouissement. Nous sommes nous-mêmes l’essence de notre propre bonheur et toutefois que notre bien-être est conditionné au choix d’autrui, il devient aléatoire. »


Le temps : une toile à tisser
Enfin, Steve Bodjona médite sur le temps, nous invitant à regarder l’avenir avec intention :
« Le passé est un fait accompli, le futur, une chance à saisir. »
« Le futur… Ce n’est rien d’autre que l’inconnu qu’il nous faut labourer, modeler et dont les résultats dépendent bien souvent du degré d’attention qu’on lui porte, de la dose de caresse que l’on lui accorde le moment venu. »
« Notre passé n’est autre qu’un champ dont les récoltes ont déjà été moissonnées. Nous en tirons nos gains selon que nous l’avons bien labouré et bien entretenu. »


Et dans Des Larmes au Crépuscule (2016), il conclut sur une note de fatalité acceptée :
« Certaines choses adviennent dans nos vies, non pas parce que nous les avons souhaitées mais, beaucoup plus parce que l’on nous y a contraint. »
Les écrits de Steve Bodjona sont une véritable mine de sagesse et de réflexions. Ils offrent une perspective précieuse sur la condition humaine et la richesse de la culture togolaise.

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